16 September 2015

T 1830/11 - Attacking new claims in appeal

EPO T 1830/11 [C]


EPO Headnote
La CBE ne comprend pas de dispositions imposant à l'opposante de fournir des moyens de preuve à l'encontre de chacune des positions de repli possibles définie dans les revendications dépendantes. Aussi, lorsque des modifications dans le jeu de revendications sont faites à la procédure orale devant la division d'opposition, y compris lorsque la revendication 1 est modifiée de telle manière à inclure les caractéristiques d'une revendication dépendante du brevet tel que délivré, l'obligation de fournir des éléments de preuve "en temps utile" selon l'article 114(2) CBE peut, en fonction des circonstances, se présenter qu'au moment du dépôt du mémoire exposant les motifs du recours (point 1).

EPO Headnote (own translation)
The EPC does not contain provision which require the opponent to provide evidence against each of the possible fall-back position defined in the dependent claims. Moreover, when changes in the set of claims are made at the oral proceedings before the Opposition Division, including the case that claims 1 is amended so as to include the features of one of the dependent claims of the patent as granted, the obligation to provide evidence "in good time" under Article 114(2) EPC may, depending on the circumstances, appear at the time of filing the statement of grounds. 

Key points
  • Before the OD, lack of inventive step had been argued based on D1+D3 or D4+D3. The opponent filed filed D8 with its statement of grounds. During OP before the OD, claims 1 and 10 were combined. 
  • The Board decides to admit D8, for the reasons given in the headnote, because the combination of claims 1 and 10 still could surprise the opponent. 
  • The Board decides to not remit the case, and maintains the patent in amended form based on an auxiliary request.
Motifs de la décision
1. Recevabilité du document D8
1.1 Le document D8 a été déposé pour la première fois avec le mémoire exposant les motifs du recours. Son admission dans la procédure est donc soumise au pouvoir discrétionnaire de la chambre tel que défini à l'article 12(4) RPCR.


1.2 L'intimée considère que le document D8 a été déposé tardivement dans la procédure sans aucune justification et que la caractéristique (film extrudé ou coextrudé) qu'il est sensé divulguer était déjà présente dans le jeu de revendications d'origine (revendication 10 de la demande ou du brevet contesté). De plus, la requérante en aurait déjà eu connaissance depuis longtemps puisqu'il est présent dans la procédure d'opposition devant l'OEB relative à D7 dans laquelle la requérante est partie. Pour l'intimée, la requérante aurait alors pu produire ce document déjà lors de la procédure d'opposition.
Elle considère de plus que le document D8 n'est pas pertinent de prime abord car il ne divulgue pas l'ensemble des caractéristiques de la revendication 1. D8 serait d'ailleurs moins pertinent que D6 déjà dans la procédure.
Pour toutes ces raisons, le document D8 ne devrait pas être admis dans la procédure.
1.3 La chambre ne peut pas suivre les arguments de l'intimée. En effet, la caractéristique relative à l'adhésif temporaire se présentant sous la forme d'un film extrudé ou coextrudé est devenu un élément central de la discussion sur l'activité inventive uniquement lors de la procédure orale devant la division d'opposition, ce que la requérante ne pouvait pas anticiper (cf. procès-verbal, point 3.5; décision contestée, point 6.1; cf. aussi réponse de l'intimée du 7 mars 2012, page 3, troisième paragraphe). Ce nouveau document vient étayer les arguments de la requérante mis en avant lors de la procédure orale devant la division d'opposition lors de laquelle ils n'ont pas été considérés comme pertinents. D8 répond en particulier à un point de la décision contestée, page 7, dernier paragraphe, qui stipule que la requérante "aurait dû trouver sans difficulté un document confirmant cette affirmation". En fait, c'est seulement dans le cas où elle aurait su à l'avance à la fois l'importance de cette caractéristique sur l'évaluation de l'activité inventive par la division d'opposition et la nécessité de justifier de son "affirmation" que la requérante aurait pu déposer ce document. Même si la requérante en avait déjà eu connaissance préalablement, comme allégué par l'intimée, elle ne pouvait pas anticiper sa pertinence au moment de la procédure orale devant la division d'opposition. Contrairement à la décision T 1811/12, non publiée au JO OEB (cf. points 2.4.1 et 3.3.3), citée par l'intimée, il existe bien dans le cas présent une raison dans la décision attaquée pour déposer le document D8 seulement au recours.
Le fait que cette caractéristique était effectivement déjà présente dans la revendication dépendante 10 du brevet tel que délivré n'enlève rien à l'effet de surprise résultant de son incorporation dans la revendication 1 lors de la procédure orale devant la division d'opposition, c'est-à-dire à un moment tellement tardif dans la procédure d'opposition que la requérante ne se trouvait plus en position de pouvoir produire ces documents pour étayer ses arguments.
Dans la CBE, la chambre ne voit pas d'obligation imposant à l'opposante de fournir des éléments de preuve à l'encontre de chacune des positions de repli possibles définie dans les revendications dépendantes. Dans le cas présent, l'obligation de les fournir "en temps utile" selon l'article 114(2) CBE ne se présentait qu'avec les motifs du recours, l'incorporation des caractéristiques de la revendication 10 ne se produisant qu'à la procédure orale. La décision T 66/11, non publiée au JO OEB (cf. point 2.1), citée par l'intimée, ne précise pas, contrairement à ce que semble en déduire l'intimée, que des documents déposés tardivement à l'encontre de modifications issues de la combinaison de revendications du brevet tel que délivré seraient inévitablement irrecevables.
Le fait que D8 ne divulgue pas l'ensemble des caractéristiques de la revendication 1 n'enlève rien au caractère pertinent quant au but de son dépôt, c'est-à-dire de montrer que la division d'opposition s'est trompée dans la décision contestée sur un point précis. L'allégation de l'intimée faite à la procédure orale et contestée par la requérante selon laquelle D6 serait plus pertinent que D8 n'est pas apparue convaincante à la chambre du fait de son manque d'étaiement.
La chambre note finalement que la pertinence de prime abord n'est pas un critère explicitement mentionné à l'article 12(4) RPCR et que la décision T 244/11, non publiée au JO OEB (cf. point 1), citée par l'intimé, ne s'applique pas dans le cas présent car elle concerne les articles 13(1) et (3) RPCR.
D8 est donc admis dans la procédure (article 12(4) RPCR).
2. Renvoi de l'affaire à la première instance
2.1 L'intimée met en avant que la requérante présente des arguments qui s'appuient sur un nouveau document (D8) non pris en compte dans la procédure d'opposition. Elle considère que pour cette raison la procédure de recours ne peut pas remplir sa fonction de vérifier le bien-fondé de la décision de la division d'opposition.
Elle estime donc légitime de pouvoir bénéficier d'un double degré de juridiction et requiert ainsi le renvoi de l'affaire à la division d'opposition.
2.2 Conformément à la jurisprudence des chambres de recours, il n'existe pas un droit absolu à ce qu'une question soit tranchée par deux instances, y compris s'il doit en résulter une révocation du brevet pour la première fois par la chambre (La Jurisprudence des chambre de Recours, 7ème édition 2013, IV.E.7.6.1). Le renvoi est matière d'appréciation au cas par cas au vu des circonstances.
Dans le cas présent, en déposant des amendements au dernier moment au cours de la procédure d'opposition, notamment en procédure orale, la chambre est d'avis que l'intimée devait s'attendre à ce que de nouveaux moyens de preuve puissent être déposés et éventuellement admis en recours pour répondre à ces modifications. La requérante n'élabore pas un nouveau cas sur la base de D8, comme semble le suggérer l'intimée, mais fournit simplement un moyen de preuve de ses affirmations antérieures qui n'avaient spécifiquement pas été suivies pour manque de support documenté. Le renvoi en raison de D8 aboutirait à ce que, sur la base d'un raisonnement identique, soit la division d'opposition révise ses conclusions, page 7, dernier paragraphe, et révoque le brevet, soit elle les confirme. Dans les deux cas l'affaire reviendrait devant la chambre et le renvoi aurait uniquement pour effet de rallonger inutilement la procédure, étant entendu que dans le premier cas l'intimée ferait probablement recours à son tour. La chambre considère donc que l'admission de D8 dans la procédure ne peut pas justifier le renvoi de l'affaire à la division d'opposition (article 111(1) CBE).

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